Dans le sillage de Fluker, le Rorqual commun amputé de sa nageoire caudale

 

Cela fait déjà deux semaines que Fluker est réapparue dans les radars, cette fois au sud est de l’Italie. Cette femelle adulte de Rorqual commun (Balaenoptera physalus) attire particulièrement l’attention du fait de son importante blessure, elle est amputée de sa nageoire caudale.

 

L’histoire de Fluker débute en 1996, lorsqu’elle est observée pour la première fois par une équipe de l’institut Tethys. Elle sera observée par le même institut en 2004 et 2005. À cette époque, Fluker était déjà amputée d’une partie du lobe gauche de sa nageoire caudale. La cause de cette blessure avait été attribuée à un filet de pêche qui aurait cisaillé sa nageoire caudale et laissé une dépression caractéristique sur l’avant de sa nageoire dorsale.

 

Par la suite, en 2006, une équipe du WWF France l’observe dans les eaux du Sanctuaire Pelagos et profite de l’occasion pour réaliser une biopsie révélant le sexe de la baleine : femelle.

 

La baleine sera observée plusieurs fois les années suivantes jusqu’en septembre 2019, où elle est observée au large du Cap Ferrat, cette fois amputée de la totalité de sa nageoire caudale. La blessure est très probablement le résultat d’un cisaillement progressif par un filet de pêche au niveau du pédoncule caudal car à l’heure actuelle on ne connaît aucune maladie ni prédateur en Méditerranée pouvant causer ce type de blessure.

 

Plusieurs observations font suite, dont les deux dernières en octobre 2019 qui la situent à la frontière espagnole en tête du canyon de Lacaze, selon les données d’observations publiées par le GECEM. 

Beaucoup donnaient l’animal comme mort, mais étonnamment, la trace de cette baleine a été retrouvée il y a trois semaines, le 5 juin, au large du Péloponnèse au sud de la Grèce (point 1 2020 sur la carte ci-dessus). Puis, le 11 juin, au large du port de Badolato au sud de l’Italie (point 2), côté mer Ionienne. Elle a pu être identifiée par le CESRAM (Centre d’Étude et de Recherche du Milieu Marin en Italie) grâce à la dépression présente sur l’avant de sa nageoire dorsale.

 

Elle a par la suite été observée dans le golfe de Catane (point 3) le 14 juin, où une vidéo de la baleine sous l’eau a pu être prise par l’association italienne Marecamp. Il a ainsi été constaté que la baleine était fortement amaigrie sûrement dû à une malnutrition sévère. Pourtant, elle continue à nager vers le sud de l’Italie à une vitesse de 100km/jour

 

Après avoir fait un petit détour par le golfe de Catane elle s’est dirigée vers le détroit de Messine (point 4) où le drone de Roberto De Domenico l’a suivi pendant quelques instants, nous laissant d’incroyables images de Fluker. Elle semble alors se diriger vers le nord-ouest de la Méditerranée.

 

Le 20 juin, après 5 jours sans aucune nouvelle de la baleine, elle est observée entre l’île Elbe et Pianosa au nord de l’Italie (point 5). Cela signifie que depuis sa dernière observation dans le détroit de Messine le 15 juin, cette femelle adulte de Rorqual commun a parcouru environ 690 km.

 

Fluker mérite bel est bien le prix de grande battante et courageuse géante de la mer. La nageoire caudale des baleines est essentielle pour la nage et les sondes de celles-ci. En effet, elle permet la propulsion dans l’eau à travers des mouvements verticaux réalisés à l’aide des puissants muscles localisés le long du pédoncule caudal.

 

Pour se déplacer Fluker a dû s’adapter, elle réussit à nager en battant des pectorales pour se propulser car le bas du corps semble quasi inerte. Cela doit être épuisant pour la baleine qui puise de grandes quantités d’énergie dans ses réserves corporelles.

 

Son voyage ne s’arrête pas là car deux jours tard, le 22 juin, elle est aperçue en mer Ligure (point 6), en plein cœur du Sanctuaire Pelagos, où l’on espère qu’elle réussira à s’alimenter dans les eaux riches du bassin nord-occidental méditerranéen.

 

Toujours dans le sanctuaire Pelagos, le 25 juin, elle est observée à 65 m de la côte de Beaulieu-sur-Mer (point 7) et à Saint-Jean-Cap-Ferrat (point 8). Elle est donc revenue à son point de départ, proche de l’endroit où elle a été vue amputée pour la première fois l’an dernier, après avoir sillonné toute la Méditerranée. Elle s’est beaucoup rapprochée de la côte, espérons qu’elle ne soit pas en grande détresse et qu’elle ne s'échoue pas sur une plage. 

 

Elle passe beaucoup de temps en surface, ne plongeant que 3 minutes tous les quart d'heure, et on ne sait pas si elle arrive à bien se nourrir pendant les sondes. La réponse tend plutôt à être négative au vu de son extrême maigreur. Elle est aussi couverte de Penella, un parasite non pathogène épizooite, dont la présence en aussi grand nombre n'augure rien de bon sur sa forme physique.

 

Nous continuons à être attentifs aux possibles observations ainsi qu’à l’évolution de la courageuse Fluker. Nous vous tiendrons au courant ! 

Si vous la croisez n'essayez pas de vous en approcher afin d’éviter tout stress supplémentaire pour l’animal. On lui doit au-moins ça!

 

Evolution de la blessure de Fluker au fil du temps

Lettre d'information

 

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